Coupelle de fruits ou moulin à vent ?

[<= Salon étoilé]

«Une jeune demoiselle ne devrait pas se traiter de la sorte.»

La voix qui venait de retentir appartenait bien évidemment à Killian. Mais où était donc ce diable ? Il avait observé Natsu depuis son arrivée jusqu’au moulin, tournant autour de celui-ci, avant d’ôter ses chaussures qui visiblement, la faisaient souffrir. Elle eut un geste étrange, touchant l’herbe de ses deux mains. Peut-être se servait-elle de sa magie ? Mais quel genre de pouvoir possédait-elle ? Si elle touchait l’herbe, il était envisageable qu’elle soit une utilisatrice de la terre... Néanmoins, de sa position actuelle, il ne pouvait être sûr de rien.


Alors, où était-il ? Le jeune homme descendit du haut du moulin, utilisant la vigne vierge qui le longeait, et dont les feuilles commençaient à prendre une belle couleur rouge grenat. Néanmoins, il s’était aidé de la paroi du moulin, afin de ne pas abîmer la plante. Le voilà qui posait sans difficulté les pieds au sol, se tournant vers Natsu, qui l’avait suivi, comme il s’en était douté. Dos au moulin, elle observait le ciel, seul réel lien entre l’établissement et le monde extérieur. Oui, les magiciens vivaient sous les mêmes étoiles que les personnes «normales», après tout.

«Et bien, et bien... Puisque tu m’as suivi, je vais pouvoir t’en demander un peu plus.» déclara-t-il, dans le silence de la nuit.

Ses yeux bleus semblaient briller, même dans l’obscurité. Posé sur la demoiselle adossée au moulin à vent, il n’avait cependant rien de menaçant. Se penchant avec souplesse, le magicien saisit une pierre, se relevant avec elle. Il s’amusa alors à la lancer au-dessus de lui, puis à la laisser retomber dans sa main. La troisième fois, il referma son poing, jetant de nouveau la pierre, mais cette fois-ci quelques mètres plus loin. Cependant, elle n’eut pas le temps de retomber, puisqu’elle se désagrégea dans les airs, se transformant en sable. Satisfait, Killian se tourna vers son interlocutrice. Si il dévoilait son pouvoir, il n’allait, en revanche, pas dévoiler son OTM.

«Comme tu as pu le constater, je suis un utilisateur de la terre. Et toi ?» s’enquit-il, avec un léger sourire en coin.

A cet instant précis, le vent se leva. Les grains de sable qui n'étaient pas encore retombés se laissèrent alors porter, brillant sous les rayons de la lune argentée. Le jeune homme observait ce spectacle, d'une beauté troublante. Il considérait, avec une certaine vanité, que son pouvoir était le plus utile. Certes, la majorité des gens étaient loin de penser de cette manière, étant donné qu'il n'avait pas une réelle utilité en combat. Mais pour remédier à cela, sa compétence, burst, était amplement suffisante. Associée aux propriétés défensives de la terre, celle-ci n'avait plus rien d'inutile. Voilà à quoi pensait le magicien lorsqu'il utilisait sa magie...

Lorsque le vent s’était levé, Natsu avait levé le poing. Si, par là, elle entendait faire penser à Killian qu’elle maîtrisait le vent, c’était une belle tentative. Tout d’abord, il y crut fermement. Mais lorsque la demoiselle lui dit de penser à ce qu’elle avait pu faire d’inhabituel, sa certitude fut balayée. Si elle contrôlait le vent, pourquoi aurait-elle touché l’herbes ? Il ne voyait pas réellement ce qu’elle pouvait faire... Mais que contrôlait-elle, alors ? Et pourquoi n’allait-elle pas droit au but ? Il n’allait pas être choqué, puisque cette école était remplie de magiciens, qui possédaient tous plus ou moins les mêmes pouvoirs...

Ne répondant pas à ses questions, la rouquine saisit son poignet gauche. Assez surpris par son geste, le jeune homme se laissa faire, curieux. Elle l’entraîna, faisant le tour du moulin, sans lâcher son bras. Ses fins doigts ne parvenaient pas à faire le tour du poignet de Killian, dont la surprise ne faisait qu’augmenter au fil des minutes. Pourquoi... avait-elle les mains si chaudes ? Ses mains à lui étaient aussi froides que la glace, et rien d’étonnant à ça ; il ne faisait pas si chaud, pour une fin d’octobre. Elle s’assit devant la porte du moulin, l’incitant à faire de même, le prévenant de quelque chose dont il n’avait même pas idée.

Natsu relâcha le bras du magicien, puis saisit des brindilles d’arbres qui jonchaient le sol. L’observant faire, son interlocuteur remarqua l’état de ses pieds. Il voulait bien croire que ses chaussures l’aient blessée... Mais pourquoi son état empirait-il alors qu’elle les avait retirées ? Y’avait-il quelque chose sur le sol ? Maintenant qu’il y pensait, elle ne cessait d’avoir une attitude étrange à l’égard du sol. Ce geste étrange d’il y a quelques minutes, la précaution qu’elle prenait tout autour du moulin... Cherchant désespérément un indice, le jeune homme fut interrompu dans sa recherche lorsqu’une flamme s’alluma devant ses yeux.

Choqué, Killian eut un geste de recul. Mais la demoiselle dirigea la flamme contre lui, lui brûlant l’avant bras. Les yeux écarquillés du pauvre magicien l’observait avec horreur. Oui, si il y avait bien une chose dont il avait horreur, c’était le feu... A présent, il n’avait plus qu’une seule envie ; s’enfuir. Son esprit était vide de toutes pensées, à part celle-ci. Il ne ressentait même plus la douleur de la brûlure. Mais alors qu’il tentait de se relever pour prendre ses jambes à son cou, Natsu lui saisit le bras, puis posa sa main sur sa blessure, qui disparut aussitôt. Se laissant retomber, le jeune homme la regardait, bouche bée.

«Tu... Tu manipules le feu ?» dit-il, marquant une pause. «Tu n’aurais pas pu simplement me le montrer, plutôt que de me brûler ?» s’exclama-t-il, comme si hurler pouvait faire passer sa frustration.

Voyant bien le jeune homme surpris, elle continua ce qu’elle avait l’intention de faire. Natsu se doutais de la réaction de Killian, c’est justement pour cela qu’aucunes paroles n’auraient values une expérience comme celle-ci. Voulant fuir cette matière, cet élément, il n’eut pas le temps. La délicatesse de la demoiselle reprit son bras pour le soigner. Son sentiment envers elle avait bel et bien changé. Elle doutait que tous les pouvoirs ne plaisaient à tout le monde. La seconde chose qu’il ne comprit pas fut l’utilisation d’une compétence. Killian lui montrait son pouvoir , Natsu fit de même en ajoutant sa compétence. D’une pierre deux coups. Mais hélas, un goût d’incompréhension régnait. Le remord prit la jeune magicienne. Si seulement elle s’était retenue de tout lui montrer, si seulement .. Mais en quelques sortes, elle lui était redevable. Tout le mystère dont Killian était le témoin devait cesser.

« Tu n’as donc pas compris.. Ca ne fait rien, la magie blanche, tu hais donc ça aussi. Le feu est un élément comme un autre .. Il faut croire que je suis ne serait-ce qu’un peu voyante. Ta réaction était inévitable. »

Killian, énervé, le fit sentir. Il passa ses nerfs sur Natsu, si on veut. Elle ne comprenait pas sa réaction. Un peu triste, elle ne savait plus quoi faire. Cette réaction se présentait à la fois comme quelque chose de choquant, énervant et triste. La seule solution pour la jeune magicienne était de s’éloigner de lui. Peut-être comprendrait-il, ou ce serait la fin d’une rencontre. Etégnant le feu présent sur les brindilles, elle les jeta au sol.

« La maîtrise d’un élément est important. Je suis fière du mien. Malgré ton total dégoût. On ne peut pas plaire à tout le monde, c’est vrai. Si je faisais le scandale que tu me fais pour ton élément, comment tu le prendrais ? Je vous laisse. Ma compagnie ne vous enchante peut-être plus. » Sa voix, terne, déçue, impassible.

Natsu se leva, attrapa ses chaussures. Elle resta immobile un certain moment. Ne sachant où aller. La jeune magicienne avait trouvé un sens à sa soirée. Maintenant, quand est-il ?

[HS : Sorry pour le retard, mais me revoilà ^^']

Adossé à la paroi du moulin, sa jambe droite repliée, l’autre étendue, Killian demeura muet pendant que Natsu parlait. Ses mots ne parvenaient même pas à son esprit. Un bourdon désagréable avait envahi son esprit, et malgré le silence de la nuit, tout ce qui l’entourait semblait bruyant. Trop bruyant. La voix de la demoiselle s’éteignit, laissant le jeune homme en proie à ses interrogations. Il ne devrait pas s’emporter pour une futilité pareille... Après tout, n’avait-il pas décidé de tout découvrir à propos de la magie ? Jusqu’à présent, il avait réussi à éviter soigneusement ce sujet délicat pour lui, mais rien n’est éternel. Oui, Killian le sait mieux que quiconque.

Les sourcils froncés, comme à son habitude, le magicien porta une main sur son front, la laissant descendre légèrement sur ses yeux. Il se leva difficilement, comme assommé, puis s’avança vers son interlocutrice, qui, immobile, attendait. L’herbe se pliait sous les semelles du jeune homme, qui finit par rejoindre la rouquine. Sa main gauche toujours sur ses yeux, il s’avança encore d’un pas, son corps frôlant le sien. Pourquoi s’aveuglait-il de la sorte ? Peut-être ne voulait-il pas voir ce qu’il s’apprêtait à faire. Ou peut-être ne voulait-il pas qu’elle ne voit son expression douloureuse, son regard crispé.

Sourd, aveugle et muet, voilà ce qu’il était. Ses deux derniers sens, l’odorat et le toucher, compensaient donc cette perte provisoire. Oui, il pouvait sentir le parfum de Natsu... Cette légère touche sucrée, rassurante. Avec une langueur douloureuse, sa main droite saisit celle de la magicienne. Elle la frôlait à peine, puis, d’un geste ferme, elle se referma, l’emprisonnant. Elle ne la serrait pas, non, elle la tenait de cette manière étrange dont on tient un oiseau ; avec fermeté, sans broyer. Enfin, ses doigts, bien plus longs et épais que ceux de la demoiselle, cherchèrent un chemin jusqu’à la paume de celle-ci.

En sentant cette chaleur émanant de la main de la jeune fille, Killian dut d’abord réprimer un cri, en se mordant la langue. Mais, tentant de se résonner, il prit une profonde inspiration. Il devait se rendre compte que la chaleur du feu et cette chaleur n’était pas la même. Il ne devait pas avoir peur. Cette sensation affreuse, cette faiblesse, il fallait qu’il s’en débarrasse. Un peu inquiet, voyant le manque de réaction de Natsu, le magicien relâcha se main et se recula d’elle, avant de tourner les talons, se retrouvant de nouveau face au moulin. Le vent se leva, portant ses mots jusqu’aux oreilles de la demoiselle. Sa main descendit le long de son visage, comme pour lui rendre ses sens.

«J’ai peut-être été réellement aveuglé par ma... peur. Mais si tu es d’accord, peut-être que tu pourrais m’aider à en apprendre plus sur le feu, et qui sait...» murmura-t-il, sans finir sa phrase.

Lorsque la jeune femme se tut, elle semblait ressentir les sentiments du jeune homme .. Une peur .. Inexplicable, mais une peur. Avait-il peur du feu comme on peut craindre les araignées ? Étrange, cependant, la seule que Natsu entendait fut ces pas .. Marchant, les jambes du jean se frottant l’une contre l’autre, après un pas, deux pas .. Heureusement, cette herbe qui plissait sous ces pas ne se trouvait pas brûlée. Le pouvoir de Natsu pouvait brûler, mais pas à ce point. Un élève de troisième cycle n’est rien comparé au quatrième et aux études supérieures .. Égarant ces pensées, la jeune magicienne semblait vouloir se séparer de cette « chose » qui l’étouffait depuis sa naissance. Justement, depuis des générations, ces « choses » comme on devait les appeler se nourrissaient du mal-être du porteur pour surgir. Les émotions de l’humains sont si fortes, si instinctives .. Que pouvait y faire cette famille ? Pour certains ce n’était plus un dont. D’ailleurs, si la mère de la jeune femme passa de « l’autre côté », ce n’est pas pour rien. Ce pouvoir affaiblissait sa mère qui ne pouvait l’utiliser en ce monde cruel. Si seulement cette école existait pour elle aussi, sa mort n’aurait pas été inévitable.

Se rendant compte des émotions qu’elle laissait passer, Natsu se tut encore un fois, et regarda la nuit noire. Habituellement, aucune tristesse n’était percevable, seulement habituellement. Un mot qui n’est pas infaillible lui non plus.

La main que craignait Killian, du moins, le pouvoir dans cette main s’approcha et saisit celle de Natsu, comme prisonnière. Que cherchait-il ? Une chaleur humaine ? Ou plutôt celle de son pouvoir ? Apercevant légèrement les yeux fermés de Killian par sa grande main .. Son autre main elle, cherchait une issue pour aller contenter ses recherches. Ne voyant que le côté néfaste des choses, elle se doutait que ce rat d’informations se fichait de sa personne. Une sorte de piège à souris. Natsu était le fromage, la piège son pouvoir, et la souris ; Killian. Lâchant enfin la petite main de Natsu, l’ouïe de celle-ci perçue un retour en arrière de son interlocuteur. Qu’amènerait la suite. Le vent, apportant ses murmures :

«J’ai peut-être été réellement aveuglé par ma... peur. Mais si tu es d’accord, peut-être que tu pourrais m’aider à en apprendre plus sur le feu, et qui sait...»

Au loto, la jeune magicienne ne gagnait jamais. Il se pourrait qu’en ce moment même ci. Se retournant légèrement, son doux et fin visage se retrouva alors sous les projecteurs de la lune. Natsu s’approcha alors de son interlocuteur. Toujours les pieds nus, ceux-ci sentaient en rafraîchissement de la nuit. Grelottant alors, la rouquine laissa tomber ses chaussures dans un bruit d’étouffement.

« En apprendre plus sur le feu ? … » Un léger soupir s’installa.

Décidant alors de vérifier une de ces hypothèse, Natsu fit face au visage de Killian. Approchant sa main du front du jeune homme en heurtant quelques mèches de ses cheveux, elle continua :

« Que t’arrive-t-il ? Pourtant tu n’as pas de fièvre … »

Sentant la chaleur humaine et non fiévreuse, Natsu ôta sa main du front de Killian. Songeant à la suite .. Quelle suite ? Son esprit, embrouillé ne comprenait plus rien. Paralysé par les évènements antérieur, et par le manque de sommeil. Mais, malgré tout, la jeune magicienne savait que si elle tentait de dormir, c’était peine perdue. Luttant alors contre Morphée, elle se rassise ; les genoux joins, la tête posée sur eux. Grelottant par la bise plus que fraîche du soir. Fermant légèrement ses yeux, elle les ré ouvra, apercevant en hauteur, à travers ses mèches de cheveux, la longue silhouette du jeune homme, immobile.

« Killian .. La nuit .. Tombe. Tu ferais mieux de te coucher .. De déballer tes affaires, tu ne crois pas », souffla-t-elle entre quelques grelottements.

La jeune homme devait se demander pourquoi elle n’usait pas de son pouvoir pour se réchauffer.. Simplement parce qu’un magicien qui ne mange pas grand-chose, et qui montre signe de faiblesse situe à peu près le niveau de sa réserve magique.